s’inclinaient devant lui. C’est ainsi que, dans le trajet du convoi, il ne faisait bonne mine qu’à l’ouvrier Markel, qui avait aveuglément adopté toutes ses idées, et à deux femmes qu’il devinait éprises de lui, Véra Efremovna et la jolie Grabetz.
En principe, Novodvorov était partisan de l’émancipation de la femme ; mais, en fait, il regardait toutes les femmes comme des créatures stupides et ridicules, à l’exception de celles dont il était amoureux, et qu’il tenait alors pour des êtres extraordinaires dont lui seul avait su juger la perfection. Il avait ainsi aimé, tour à tour, un grand nombre de femmes ; et deux fois même il avait vécu maritalement avec des maîtresses : mais, les deux fois, il avait quitté ses maîtresses, ayant constaté que ce qu’il éprouvait pour elles n’était pas le véritable amour. Il se préparait, maintenant, à contracter une nouvelle union avec la Grabetz.
Il méprisait Nekhludov, parce que celui-ci, suivant son expression, « faisait des manières » avec la Maslova ; mais, en réalité, il le méprisait et le haïssait parce que, loin de partager ses idées sur les moyens de remédier aux défauts de la société, Nekhludov avait sur ce point une idée à lui, traitant les questions sociales « en prince », c’est-à-dire en imbécile. Et Nekhludov se rendait compte de ces sentiments de Novodvorov à son égard ; et il sentait, à son grand chagrin, que, malgré les dispositions bienveillantes où il se trouvait pour le moment, rien au monde ne pouvait l’empêcher d’éprouver, lui aussi, à l’égard de cet homme, un mélange de mépris et de malveillance.