plus aimables, par-dessus le cercle de têtes qui entourait son divan. À l’autre extrémité du salon, autour de la table à thé, des dames étaient assises, causant avec des hommes debout devant elles, et l’on entendait un bourdonnement ininterrompu de voix graves ou flûtées.
— Enfin ! Vous ne voulez donc plus nous connaître ? Êtes-vous fâché ? Qu’est-ce que nous vous avons fait ?
C’est par ces mots, donnant à supposer entre elle et Nekhludov une intimité qui jamais n’avait existé, c’est par ces mots qu’Anna Ignatievna accueillit le nouveau venu.
— Vous vous connaissez, n’est-ce pas ? Madame Bielavskaïa, Michel Ivanovitch Chernov… Allons ! asseyez-vous là, tout près de moi !
— Missy, venez donc à notre table ! On vous apportera votre thé ! — reprit-elle en élevant la voix et en s’adressant à l’autre groupe. — Et vous, prince, un peu de thé ?
— Jamais vous n’arriverez à me le faire croire ! Elle ne l’aimait pas, voilà tout ! — dit une voix de femme.
— C’est excellent, ces gaufrettes, et si léger ! — dit une autre voix. — Donnez-m’en donc encore une.
— Et vous partez déjà pour la campagne ?
— Oui, demain. C’est pour cela que nous sommes venues aujourd’hui. Un si beau printemps ! Il doit faire si bon, sous les arbres !
Coiffée d’un petit chapeau de velours, vêtue d’une robe rayée qui dessinait merveilleusement sa taille fine, Missy était très belle. Elle rougit en apercevant Nekhludov.
— Je vous croyais parti ! — dit-elle.
— Je suis sur le point de partir, — répondit Nekhludov. Les affaires me prennent tout mon temps. Et je ne suis venu ici que pour affaire.
— Je vous en prie, venez voir maman avant de partir. Elle a absolument besoin de vous voir !
Elle sentit qu’elle mentait et qu’il le sentait aussi, et elle devint encore plus rouge.
— Je crains de n’avoir pas le temps ! — répliqua