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Les diverses opinions sur l’art et la beauté que je viens de mentionner, y compris encore, pour l’Angleterre, celles de Todhunter, de Mozley, de Ker, de Knight, etc., sont loin d’épuiser tout ce qui a été écrit sur la matière. Pas un jour ne se passe sans que surgissent de nouveaux esthéticiens, dans les doctrines desquels se retrouvent, invariablement, le même vague et la même contradiction. Quelques-uns, par inertie, se bornent à reprendre, avec de légères variantes, l’esthétique mystique des Baumgarten et des Hegel ; d’autres transfèrent la question dans la région de la subjectivité, et rattachent la beauté au goût ; d’autres, les esthéticiens des dernières générations, cherchent l’origine de la beauté dans les lois de la physiologie ; et d’autres enfin envisagent résolument le problème de l’art en dehors de toute conception de beauté. Ainsi Sully, dans Sensation and Intuition, élimine tout à fait la notion de beauté. L’art, dans sa définition, est simplement un produit apte à procurer à son producteur une jouissance active, et à faire naître une impression agréable chez un certain nombre de spectateurs ou d’auditeurs, indépendamment de toute considération de l’utilité pratique.