Lui seul peut faire que les sentiments d’amour et de fraternité, accessibles seulement, aujourd’hui, aux hommes les meilleurs de notre société, qu’ils deviennent des sentiments constants, universels, instinctifs chez tous les hommes. En provoquant en nous, à l’aide de sujets imaginaires, les sentiments de la fraternité et de l’amour, il peut nous accoutumer à ressentir les mêmes sentiments dans la réalité ; il peut disposer dans l’âme humaine des rails sur lesquels courra désormais la vie, sous la conduite de la science et de la religion. Et en unissant les hommes les plus différents dans des sentiments communs, en supprimant les distinctions entre eux, l’art universel peut préparer les hommes à l’union définitive ; il peut leur faire voir, non par le raisonnement, mais par la vie même, la joie de l’union universelle, en dehors des barrières imposées par la vie.
La destination de l’art dans notre temps est de transporter du domaine de la raison dans celui du sentiment cette vérité : que le bonheur des hommes consiste dans leur union. C’est l’art qui seul pourra fonder, sur les ruines de notre régime présent de violence et de contrainte, ce royaume de