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Chavannes, les Burne-Jones, les Böcklin et les Stuck ; en musique, les Wagner, les Liszt et les Richard Strauss : mais l’art véritable, je ne dis pas le plus élevé, mais même le plus simple, ils sont absolument incapables de le comprendre.

Et il en résulte que, dans nos classes supérieures, privées ainsi de la faculté de subir la contagion des œuvres d’art, les hommes croissent, s’élèvent, et vivent sans subir l’action adoucissante, améliorante de l’art ; et de là vient cet autre résultat fatal, que non seulement ils ne s’efforcent pas vers le bien et la perfection, mais que, au contraire, avec tout le développement de leur soi-disant civilisation, ils deviennent sans cesse plus sauvages, plus grossiers, et d’un cœur plus dur.

Telle est la conséquence de l’absence, dans notre société, de la fonction qu’est chargé d’accomplir l’organe indispensable de l’art. Mais les conséquences qui découlent du mauvais fonctionnement de cet organe sont plus funestes encore ; et leur nombre est grand.

La première de ces conséquences saute aux yeux. C’est l’énorme dépense de travail humain pour des œuvres non seulement inutiles, mais le plus