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jeux, et au milieu desquelles nous, les hommes de la classe opulente, nous vivons, il ne peut être question d’une existence morale quelconque. Que de fois nous nous servons, pour justifier notre mauvaise conduite, de l’affirmation qu’un acte qui irait à l’encontre de la vie ordinaire ne serait pas naturel, n’indiquerait que le désir de poser, et, par suite, serait une mauvaise action ! Cette argumentation semble être inventée pour que les hommes n’abandonnent jamais leur mauvaise conduite. Si notre vie était toujours juste, toute action conforme à cette vie serait forcément juste ; et si notre vie n’est qu’à moitié bonne, il y a autant de chances pour que toute action qui n’est pas conforme à l’avis général soit bonne ou mauvaise ; si enfin notre vie est mauvaise, comme celle des classes dirigeantes, il est impossible de faire une seule bonne action sans compromettre le train régulier de notre vie.