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Après tout, qui oserait dire que cette préoccupation les empechait d’être des héros ? Les dieus mêmes d’Homère se réjouissaient devant les énormes morceaux de venaison qu’on leur servait : et le Valhalla n’est qu’un paradis où l’on mange à satiété.

Il n’importe : c’est un pas fait en avant dans la moralité personnelle, individuelle, que d’avoir un certain dédain pour la bonne chère, et c’est faire preuve, non d’une âme vile, mais d’un esprit étroit, que de s’intéresser aux mets qui constituent nos repas. L’idéal des animaus ne doit pas etre l’idéal de l’homme, et nous devons mettre le but de notre vie plus haut que la mastication de tel ou tel plat, plus ou moins succulent.

Et cependant, lorsque, après une journée laborieuse, le père de famille se retrouve au milieu des siens, quand des amis qui ne se sont pas vus depuis longtemps se rassemblent pour causer gaiement, un certain luxe de table