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Je ne crois vraiment pas qu’en puisse trouver de phénomène plus lamentable, indiquant mieux l’état précaire et imparfait de notre constitution sociale. Tout ce qu’en peut dire à cet égard est encore moins triste que la triste vérité.

Toutefois la misère n’est à plaindre que si elle est imméritée ; par exemple celle des petits enfants, ou des femmes, ou encore celle des hommes qui ne peuvent pas trouver de travail, ou encore, — ce qui est, je crois, le cas le plus fréquent, — celle des ouvriers, de la ville ou de la campagne, dont le salaire est insuffisant. Mais heureusement, si profondes que soient certaines misères, en France, en Angleterre, en Amérique, en Allemagne, elles ne vont pas jusqu’à la mort par inanition, et ce n’est guère qu’en Russie et en Asie que la faim fait des victimes. Hélas ! c’est beaucoup trop encore ; et il me semble bien vrai que tout homme de cœur doive en garder