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réconcilier auparavant avec votre frère, et puis vous reviendrez offrir votre don ; 25 : Accordez-vous au plus tôt avec votre adversaire pendant que vous êtes en chemin avec lui, de peur que votre adversaire ne vous livre au juge, et que le juge ne vous livre au ministre de la justice, et que vous ne soyez mis en prison ; 26 : Je vous dis en vérité que vous ne sortirez pas de là que vous n’ayez payé jusqu’à la dernière obole. »

Quand j’eus compris le commandement « ne résistez pas au méchant », il me parut que ces versets devaient avoir un sens tout aussi clair et tout aussi réalisable que ce commandement même que je viens de citer.

Le sens que je donnais auparavant au passage était que chacun doit toujours éviter la colère contre les autres, ne doit jamais prononcer de paroles injurieuses et doit vivre en paix avec tous, sans aucune exception. Mais il y avait dans le texte un mot qui excluait ce sens. Il y était dit : ne te mets pas en colère sans cause ; de sorte que ces paroles ne pouvaient être une exhortation à la paix absolue. J’étais fort perplexe et je m’adressai aux commentaires des théologiens pour éclaircir mes doutes ; à mon grand étonnement, je constatai que les commentaires prenaient principalement à tâche de préciser les cas où la colère est permise. Tous les commentateurs de l’Église s’appesantissent sur le mot sans cause, et expliquent ce terme dans ce sens : qu’il ne faut pas offenser quelqu’un sans raison, qu’il ne faut pas injurier, mais que la colère n’est pas toujours injuste, et, pour confirmer leur explication, ils citent des exemples de la colère des Apôtres et des Saints.

Il me fut impossible de ne pas reconnaître que les commentaires qui soutiennent que la colère « à la gloire