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de la loi écrite, il aurait employé également dans le verset suivant, qui continue sa pensée, l’expression : la loi et les prophètes, et non le mot « la loi » tout court, tel que nous le trouvons dans ce verset : mais il y a plus, Jésus se sert d’après Luc de la même expression, et le contexte rend cette signification inévitable.

D’après Luc (xvi, 15 et suiv.), Jésus dit aux pharisiens qui attribuaient la justice à leur loi écrite : « Pour vous, vous avez grand soin de paraître justes devant les hommes, mais Dieu connaît le fond de vos cœurs ; car ce qui est grand aux yeux des hommes est en abomination devant Dieu. »

« La loi et les prophètes ont duré jusqu’à Jean ; depuis ce temps-là le royaume de Dieu est annoncé aux hommes, et chacun fait effort pour y entrer. » Et, immédiatement après le 17e verset, Il dit : « Or, il est plus aisé que le ciel et la terre passent, que non pas qu’un seul petit trait de la loi manque d’avoir son effet ». Par les mots : « La loi et les prophètes jusqu’à, Jean », Jésus abroge la loi écrite. Par les mots : « Il est plus aisé que le ciel et la terre passent, que non pas qu’un seul petit trait de la loi manque d’avoir son effet, » Jésus confirme la loi éternelle.

Dans la première citation, Il dit : La loi et les prophètes, c’est-à-dire la loi écrite ; dans la seconde, Il dit : la loi tout court, par conséquent, la loi éternelle. Ainsi, il est clair qu’ici la loi éternelle est opposée à la loi écrite[1] tout comme dans le contexte de Matthieu où

  1. Il y a plus, Jésus, comme s’il voulait qu’il ne restât pas le moindre doute au sujet de la loi dont il parle, cite immédiatement, en connexion avec ce passage, l’exemple le plus décisif de la négation de la loi de Moise par la loi éternelle, par cette loi de laquelle pas un iota ne peut disparaitre. Il cite, de toutes les sentences de l’Évangile, celle qui est en opposition la plus absolue avec la loi de Moïse, Luc, xvi, 18 : « Quiconque répudie sa femme et en épouse une autre commet adultère, c’est-à-dire : selon la loi écrite, le divorce est permis, selon la loi éternelle, — il est interdit.