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le superflu de leur travail aux autres, il n’y aurait pas d’ennemis, — d’Allemands, de Turcs ou sauvages, — pour tuer ou tourmenter de pareils hommes. Ils prendraient tout ce que leur auraient abandonné volontairement ces hommes, pour lesquels il n’y a pas de différence entre le Russe, le Turc et le sauvage. Mais si ces chrétiens se trouvaient au milieu de sociétés non chrétiennes qui se défendent les armes à la main, et que ces chrétiens fussent appelés à prendre part à la guerre, c’est alors précisément que s’offre pour un chrétien la possibilité de venir au secours des hommes qui ne connaissent pas la vérité. Un chrétien ne connaît la vérité que pour témoigner de la vérité devant ceux qui ne la connaissent pas. Et ce témoignage, il ne peut le rendre que par des actes. Ces actes sont : de renoncer à la guerre, de faire le bien aux hommes sans distinction de ce qu’on appelle ennemis et compatriotes.

Mais voici que des malfaiteurs de vos compatriotes, non plus l’ennemi, attaquent la famille d’un chrétien, et, s’il ne se défend pas, ils le pillent, lui font violence, le massacrent, lui et toute sa maison. Encore, cela n’est pas vrai. Si tous les membres de cette famille sont chrétiens, et par conséquent font consister leur vie à servir les autres, il ne se trouvera pas un homme assez fou pour venir enlever le nécessaire à des gens prêts à le servir, ou pour les tuer.

Le célèbre Maclay s’établit au milieu des sauvages les plus sanguinaires, et non seulement il ne fut pas tué, mais, pris en affection, les sauvages se soumirent à lui, précisément parce qu’il ne les craignait pas, n’exigeait rien d’eux et leur faisait le bien.

Mais si un chrétien vit au milieu d’une famille ou de