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vie. Tout cela se trouve, me dit-il, chez les stoïciens, chez les brahmines, dans le Talmud. La substance de la doctrine chrétienne n’est pas là, mais dans la doctrine théosophique formulée dans les dogmes.

C’est-à-dire : ce qui m’est cher dans la doctrine chrétienne, ce n’est pas ce qu’elle contient d’éternel et d’humanitaire, d’indispensable à la vie raisonnable ; ce qui m’est cher et important dans le christianisme, c’est ce qui est impossible à comprendre — donc inutile — ce au nom de quoi des milliers d’hommes ont été tués.

Nous nous sommes formé une fausse conception de notre vie et de la vie universelle basée uniquement sur notre méchanceté et nos passions personnelles, et nous considérons notre foi dans cette fausse conception, que nous rattachons extérieurement à la doctrine de Jésus, comme ce qu’il y a de plus important et de plus nécessaire pour la vie. Sans cette foi dans ce qui est un mensonge, soutenu par des hommes pendant des siècles, cette fausse conception de notre vie ainsi que la vérité de la doctrine de Jésus auraient été mises à nu depuis longtemps.

C’est terrible à dire, mais il me paraît que si la doctrine de Jésus et celle de l’Église qui a poussé dessus n’avaient jamais existé, — ceux qui s’appellent aujourd’hui chrétiens auraient été beaucoup plus près qu’ils ne le sont de la doctrine de Jésus, c’est-à-dire de la doctrine raisonnable qui enseigne le vrai bien de la vie. Les doctrines morales des prophètes du monde entier n’auraient pas été lettre close pour eux. Ils auraient eu leurs petits docteurs de la vérité, et ils leur auraient donné leur confiance. Aujourd’hui, toute la vérité est révélée et cette vérité a tellement épouvanté ceux dont