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me réjouir de connaître le chemin, et je ne puis pas ne pas désirer de toutes les forces de mon âme de passer par ce chemin.

On compare cette règle de ne pas résister au mal par la violence, à celle de ne pas jeter les enfants par les fenêtres, ce qui parfois peut être nécessaire, et l’on tire de là cette conclusion que la règle de ne pas jeter les enfants par les fenêtres est irrégulière. Mais, tout au contraire, ce syllogisme est absolument régulier, et nécessaire. Soutenir qu’on ne peut défendre de jeter les enfants par les fenêtres, parce que le besoin peut s’en faire sentir lors d’un sinistre, n’est possible que pour celui qui a l’habitude de faire souffrir les enfants, qui se livre à de tels actes au cours desquels cette nécessité peut se présenter parfois.

La violence et l’assassinat vous ont révolté, et alors, entraîné par un sentiment naturel, vous opposez, par exemple, à la violence et à l’assassinat, la violence et l’assassinat. Une telle action, bien que très animale et peu sage, n’a en soi rien de stupide et de contradictoire ; mais aussitôt que le gouvernement et les révolutionnaires veulent justifier cette action par des raisons intellectuelles, alors c’est un terrible galimatias et il faut une foule de sophismes pour qu’on ne voie pas l’incohérence d’une telle tentative.