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vengeance et de la méchanceté) que pour les obliger à faire malgré eux ce qu’ils veulent. La nécessité de faire contre son désir la volonté des autres, c’est l’esclavage. C’est pourquoi tant qu’on usera d’une violence quelconque destinée à forcer les uns à faire la volonté des autres, il y aura l’esclavage. Toutes les tentatives de la destruction de l’esclavage par la violence sont semblables à l’extinction du feu par le feu, ou au remplissage d’un trou par de la terre prise en faisant un autre trou. C’est pourquoi, s’il existe un moyen d’affranchir les hommes de l’esclavage, il doit consister non dans l’institution de nouvelles violences mais dans la destruction de ce qui produit la possibilité de la violence gouvernementale. Et la possibilité de cette violence — comme de toute violence de la minorité sur la majorité — est due à ce que seul le petit nombre est armé, tandis que la majorité est sans armes ; ou que le petit nombre est mieux armé que le plus grand. C’est ainsi que se sont produites toutes les occupations ; ainsi que les Grecs, les Romains, les Chevaliers et les Cortès ont vaincu des peuples ; ainsi qu’on remporte des victoires en Afrique et en Asie ; ainsi qu’en temps de paix le gouvernement tient ses sujets dans l’obéissance. De même que dans l’antiquité, actuellement les uns dominent les autres parce qu’ils sont armés et que les autres ne le sont