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lie pas les ouvriers entre eux, mais les divise.

C’est pourquoi, avec la socialisation des instruments de travail, si les hommes sont libres, ils admettront une division du travail telle, que l’ouvrier en retire plus de bien que de mal. Et comme chaque homme voit le bien dans l’élargissement et la variété de son activité, il est évident que la division actuelle du travail sera impossible dans une société libre. Et aussitôt que se changera la division actuelle du travail, aussitôt diminuera, et dans d’énormes proportions, la production des objets dont nous profitons maintenant et dont profitera toute la société (socialiste).

Supposer qu’avec la généralisation des instruments de production subsistera la même abondance d’objets produits par une division forcée du travail, c’est la même chose que supposer qu’avec l’émancipation des serfs subsisteront les orchestres domestiques, les jardins, les tapis, les dentelles, les théâtres qui étaient faits par les serfs.

Ainsi l’hypothèse qu’avec la réalisation de l’idéal socialiste tous les hommes seront libres et en même temps profiteront de tout ou de presque tout ce dont profitent les classes aisées d’à présent, renferme en soi une contradiction évidente.