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— Quand êtes-vous venu au travail ?

— Quand ? Hier matin.

— Et cette nuit, où étiez-vous ?

— Mais, c’est simple, au déchargement.

— Vous avez travaillé la nuit ? demandai-je moi-même.

— Sans doute, nous avons travaillé.

— Et aujourd’hui, quand êtes-vous venu ici ?

— Dès le matin, quand voulez-vous que ce soit ?

— Et quand aurez-vous fini votre travail ?

— Quand on nous dira de partir, alors nous finirons.

Les quatre ouvriers qui complétaient l’équipe se montrèrent alors. Tous étaient sans pelisse, en blouses déchirées, malgré un froid de 20°.

Je me mis à les interroger sur les moindres détails de leur travail ; et ils parurent étonnés de l’intérêt que je prenais pour une chose qu’ils trouvaient toute simple et naturelle, pour leur travail de trente-six heures.

Tous sont de la campagne, la plupart viennent des provinces de Toula, il y en a aussi d’Orel et de Voronèje. Ils vivent à Moscou, quelques-uns avec leur famille, mais la plupart seuls et ceux-ci envoient de l’argent à la maison.

Ils prennent leurs repas isolément, chez leurs logeurs. La nourriture coûte 10 roubles par mois, et ils mangent toujours de la viande, sans tenir compte des carêmes.