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méchant l’a puni pour cela et nous tous avec lui ; puis qu’il a expié lui-même le péché par la mort de son fils, et que notre but principal consiste à attendrir ce Dieu et à s’affranchir des souffrances auxquelles il nous a destinés.

Il nous semble que ce n’est rien, que c’est même utile à un enfant, et nous l’entendons avec plaisir répéter toutes ces horreurs, sans réfléchir à cette terrible transformation, que nous ne remarquons pas parce qu’elle est spirituelle, et qui se produit à ce moment dans l’âme même de l’enfant. Nous pensons que l’âme de l’enfant est table rase, qu’on peut y écrire tout ce qu’on veut, mais c’est une erreur. Il y a chez l’enfant une vague lueur sur ce qu’il y a un commencement à tout, sur la cause de son existence, sur la force à laquelle il est soumis, et il a, non précise, non exprimable par les paroles, mais reconnue par toute l’existence, la plus haute idée qu’a tout homme sensé du commencement ; et tout à coup, au lieu de cela, on lui dit que ce commencement n’est qu’une folle terrible et méchante créature, le dieu hébraïque. L’enfant a une conception vague mais juste du but de cette vie qu’il voit dans le bonheur obtenu par la communion d’amour. Au lieu de cela, on lui dit que le but principal de la vie n’est que le caprice de ce Dieu fou, et que le but personnel de chacun est de se débarrasser des