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hommes qui pratiquent toutes les formes extérieures de la foi sont récompensés et acquièrent de nouveaux droits.

Ainsi agissent les orthodoxes ; mais toutes les églises sans exception emploient dans ce but tous les moyens, dont le principal aujourd’hui est ce qu’on appelle l’hypnotisation.

On met en œuvre tous les arts, depuis l’architecture jusqu’à la poésie, pour influer sur l’âme et endormir l’intelligence, — et cette influence est continue. Cette nécessité d’hypnotiser les hommes peut être particulièrement remarquée dans l’armée du salut, qui emploie des moyens nouveaux auxquels nous ne sommes pas encore habitués, comme les trompes, les tambours, les chants, les drapeaux, les costumes, les processions, les danses, les larmes et d’autres moyens dramatiques.

Mais cela ne nous frappe que parce que ce sont des procédés nouveaux. Est-ce que les anciens procédés des temples, avec leur éclairage particulier, l’éclat des dorures, les cierges, les chœurs, les orgues, les cloches, les chasubles, les prédicateurs larmoyants, etc., n’étaient pas analogues ?

Mais, malgré toute la puissance de cette hypnotisation, ce n’est pas en cela que consiste l’action la plus funeste de l’église. Elle est dans sa tendance à tromper les enfants, ces mêmes enfants dont le Christ a dit : « Malheur à qui tentera un seul de ces petits ! » Dès le premier éveil de sa conscience, on commence à mentir à l’enfant ; on lui enseigne solennellement des choses auxquelles ses éducateurs eux-mêmes ne croient pas, et on le fait avec tant d’habileté et de constance que ces croyances deviennent pour lui, par l’habitude, une seconde nature. On a soin de le tromper sur la question