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— en son nom ou au nom d’une société — que nous nous trouvons en possession de l’entendement complet et de l’observance parfaite de la doctrine du Christ serait un renoncement à l’esprit de cette doctrine même.

Si étrange que cela paraisse, toute église, comme église, a toujours été et ne peut pas ne pas être une institution non seulement étrangère, mais directement opposée à la doctrine du Christ. Ce n’est pas sans motif que Voltaire l’a appelée l’infâme. Ce n’est pas sans motif que toutes ou presque toutes les prétendues sectes chrétiennes ont reconnu et reconnaissent l’église dans la grande pécheresse que prédit l’Apocalypse. Ce n’est pas sans motif que l’histoire de l’église est l’histoire des plus grandes cruautés et des pires horreurs.

Les églises, comme églises, ne sont pas des institutions qui ont à leur base un principe chrétien, même quelque peu dévié de la voie droite, comme le pensent nombre de personnes. Les églises, comme sociétés affirmant leur infaillibilité, sont des institutions antichrétiennes. Non seulement il n’y a rien de commun entre les églises et le christianisme, sauf le nom, mais leurs principes sont absolument opposés et hostiles. Les unes représentent l’orgueil, la violence, la sanction arbitraire, l’immobilité et la mort ; l’autre, l’humilité, la pénitence, la soumission, le mouvement et la vie.

On ne peut pas servir en même temps ces deux maîtres : il faut choisir l’un ou l’autre.

Les serviteurs des églises de toutes confessions cherchent, surtout en ces derniers temps, à se présenter comme les partisans du progrès dans le christianisme. Ils font des concessions, veulent corriger les abus qui se sont introduits dans l’église et disent qu’on ne peut pas nier, à cause de ces abus, le principe même de l’église chrétienne qui peut, seule, unir tous en un seul tout,