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ne trouverez même un semblant de définition de l’hérésie.

L’argumentation sur ce sujet du savant historien du christianisme, E. de Pressensé, dans son Histoire du Dogme avec l’épigraphe : Ubi Christus, ibi Ecclesia (Paris, 1869), est un exemple de cette absence complète de toute définition du mot hérésie. Voici ce qu’il dit dans sa préface (page 3) :

« Je sais que l’on nous conteste le droit de qualifier ainsi (c’est-à-dire appeler hérésie) les tendances qui furent si vivement combattues par les premiers Pères. La désignation même d’hérésie semble une atteinte portée à la liberté de conscience et de pensée. Nous ne pouvons partager ce scrupule, car il n’irait à rien moins qu’à enlever au christianisme tout caractère distinctif… »

Et après avoir dit qu’après Constantin l’église abusait réellement de son pouvoir de considérer comme hérétiques ceux qui étaient en désaccord avec elle, et de les persécuter, il dit, en faisant l’historique des premiers temps :

« L’église est une libre association ; il y a tout profit à se séparer d’elle. La polémique contre l’erreur n’a d’autres ressources que la pensée et le sentiment. Un type doctrinal uniforme n’a pas encore été élaboré ; les divergences secondaires se produisent en Orient et en Occident avec une entière liberté ; la théologie n’est point liée à d’invariables formules. Si au sein de cette diversité apparaît un fonds commun de croyances, n’est-on pas en droit d’y voir non pas un système formulé et composé par les représentants d’une autorité d’école, mais la foi elle-même, dans son instinct le plus sûr et sa manifestation la plus spontanée ? Si cette même unanimité qui se révèle dans les croyances essentielles, se