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principes est la non-résistance au mal par la violence, n’est pas possible pour nous, parce qu’elle nous obligerait à changer toute notre vie.

La doctrine du Christ n’est pas possible, parce que, si elle était suivie, notre manière de vivre ne pourrait continuer. En d’autres termes, si nous avions commencé par vivre bien, comme le Christ nous l’enseigne, nous n’aurions pas pu continuer en vivant mal comme nous le faisons et comme nous y sommes habitués. Quant à la question de la non-résistance au mal, non seulement elle ne peut se raisonner, mais le seul fait d’une telle prescription dans l’Évangile est déjà une preuve suffisante de l’impossibilité de toute la doctrine.

Et cependant il semble nécessaire de donner une solution quelconque à cette question, car elle est à la base de tout notre ordre social.

La difficulté est là. Comment résoudre l’antagonisme de gens dont les uns regardent pour mal ce que les autres considèrent pour bien, et réciproquement ? Car déclarer mal ce que je regarde pour tel, malgré l’assurance de mon adversaire qui déclare que c’est un bien, ce n’est pas une réponse. Il ne peut exister que deux solutions : ou trouver un critérium véritable, indiscutable de ce qu’on appelle le mal, ou ne pas résister au mal par le mal.

La première solution a été tentée au commencement des temps historiques et, comme nous le savons, n’a donné aucun résultat satisfaisant. La deuxième solution, c’est de ne pas résister par le mal à ce que nous appelons le mal jusqu’à ce que nous ayons trouvé un critérium certain : c’est ce que le Christ nous a enseigné.

On peut trouver que cette solution n’est pas bonne ; on peut la remplacer par une autre meilleure en donnant un critérium qui fixe pour tout le monde ce qu’est le