gens affamés et inoffensifs qui le nourrissent, avait l’air de savoir fort bien ce qu’il faisait et même d’en tirer gloire.
Qu’est-ce donc ?
Tout ce monde se trouve à une demi-heure de l’endroit où il va accomplir les actes les plus terribles qu’on puisse imaginer, et il s’en approche tranquillement !
Dire que tous ces fonctionnaires, officiers et soldats ne savent pas ce qu’ils vont faire est impossible, puisqu’ils s’y sont préparés. Le gouverneur a dû donner des ordres relatifs aux verges, les fonctionnaires ont dû les marchander, les acheter et les porter sur leur livre de dépenses ; les militaires ont donné ou reçu des ordres relativement aux cartouches. Ils savent tous qu’ils vont martyriser, peut-être tuer leurs frères épuisés par la famine et qu’ils vont commencer cette besogne dans une heure peut-être.
Dire, comme on le dit généralement et comme ils le répètent eux-mêmes, qu’ils agissent par conviction de la nécessité de maintenir l’organisation gouvernementale, serait injuste, d’abord parce qu’il est douteux que tous ces hommes se soient jamais préoccupés de l’organisation gouvernementale et de sa nécessité ; ensuite parce qu’ils ne peuvent pas être convaincus que l’acte auquel ils participent servira au maintien et non pas à la ruine de l’état ; et enfin parce qu’en réalité le plus grand nombre d’entre eux, si ce n’est tous, non seulement ne sacrifieront jamais leur tranquillité et leur joie pour maintenir l’état, mais encore ne laisseront jamais passer l’occasion de profiter, au détriment de l’état, de tout ce qui peut augmenter leur tranquillité et leur bien-être. Ce n’est donc pas par principes qu’ils le font.
Qu’est-ce donc ?
Je les connais cependant, tous ces hommes. Si je ne