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L’exécution de la décision des autorités supérieures se traduit par l’homicide, par des supplices ou par la menace de l’un ou de l’autre, selon que les gens se révoltent ou se soumettent.

Dans le premier cas, c’est-à-dire si le paysan se révolte, les choses se passent en Russie (comme dans tous les pays où existe le droit de propriété), les choses se passent de la manière suivante :

Le gouverneur prononce un discours dans lequel il demande la soumission. La foule, surexcitée et ordinairement abusée par les plus exaltés, n’a rien compris au langage pompeux du fonctionnaire ; sa surexcitation augmente ; alors le gouverneur réclame la soumission de la foule et lui ordonne de se dissiper, sinon il sera forcé de recourir à la force.

Si la foule ne se soumet pas et ne se dissipe pas, le gouverneur ordonne de tirer à blanc. Si la foule même alors ne se dissipe pas, le gouverneur ordonne de tirer sur la foule, n’importe sur qui ; le soldat tire ; dans la rue tombent les morts et les blessés. Alors la foule se dissipe et les soldats, par ordre du gouverneur, s’emparent parmi elle de ceux qui leur semblent les plus dangereux et les emmènent sous escorte ; on ramasse ensuite les mourants ensanglantés, les estropiés, les morts, les hommes blessés, quelquefois des femmes et des enfants. Les morts sont enterrés, les estropiés envoyés dans les hôpitaux.

Ceux que l’on considère comme les meneurs les plus exaltés sont emmenés en ville et jugés par un conseil de guerre. Quand il est prouvé que leur rébellion a été jusqu’à la violence, on les condamne à la pendaison. Alors se dresse la potence. On étrangle des victimes sans défense, comme cela se passe fréquemment en Russie et comme cela ne peut se passer autrement partout