Page:Tolstoï - Le salut est en vous.djvu/291

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Les capitalistes abandonnent une partie de leurs capitaux à des institutions publiques d’instruction, d’art ou de philanthropie. N’ayant pas la force de se séparer de leurs richesses de leur vivant, beaucoup parmi eux les lèguent à des institutions publiques.

Tous ces phénomènes pourraient sembler des cas exceptionnels si on n’en devinait la cause unique, comme on s’étonnerait en avril des premiers bourgeons si on n’en connaissait pas la cause générale, le printemps ; de sorte que, en voyant quelques branches se gonfler et verdir, on peut dire avec certitude que les autres vont en faire autant.

De même en ce qui concerne les manifestations de l’opinion publique chrétienne. Si cette opinion publique agit déjà sur quelques personnes, les plus impressionnables, et les force, chacune dans son milieu, à abandonner les avantages que leur procure la violence, elle continuera à agir et son action se poursuivra jusqu’au moment où elle changera toute l’organisation actuelle et la mettra d’accord avec l’idée chrétienne qui a pénétré déjà dans la conscience des hommes de l’avant-garde.

S’il se trouve déjà des gouvernants qui ne décident rien de leur propre autorité, qui cherchent à ressembler le plus possible, non à des souverains, mais à de simples mortels, et qui sont prêts à abandonner leurs prérogatives et à devenir les premiers citoyens de leurs pays ; s’il se trouve déjà des militaires qui comprennent toute la barbarie de la guerre et désirent n’avoir à tirer ni sur les étrangers ni sur leurs concitoyens, des juges et des procureurs qui ne veulent pas charger et condamner des criminels, des prêtres qui évitent de prêcher le mensonge, des publicains qui cherchent à adoucir le plus possible la rigueur de leurs fonctions, et des riches