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l’expérience, sont amenés à la nécessité de la conception chrétienne de la vie, augmente de plus en plus, et des hommes de moins en moins grossiers et cruels remplacent les autres au pouvoir.

Le pouvoir choisit et attire les éléments les plus mauvais de la société, les transforme, les améliore, les adoucit et les rend à la société.

Tel est le processus à l’aide duquel le christianisme se répand de plus en plus. Le christianisme pénètre dans la conscience des hommes malgré la violence du pouvoir, et même grâce à cette violence.

C’est pourquoi l’affirmation des défenseurs de l’état que si on supprimait la violence gouvernementale, les méchants domineraient les bons, non seulement ne prouve pas que la domination des méchants soit à redouter puisqu’elle existe déjà, mais prouve, au contraire, que le pouvoir entre les mains des méchants est précisément le mal qu’on doit supprimer et qui se supprime graduellement par la force des choses.

« Mais, s’il était vrai que la violence gouvernementale dût disparaître lorsque les gouvernants deviendront suffisamment chrétiens pour abandonner eux-mêmes le pouvoir et qu’il ne se trouvera plus personne pour les remplacer, qu’adviendrait-il ? » disent les défenseurs de l’ordre de choses actuel. « Si, malgré les dix-huit siècles déjà écoulés, il se trouve encore tant d’amateurs du pouvoir et si peu de résignés à la soumission, il n’y a aucune probabilité pour que cela arrive, non seulement bientôt, mais même jamais.

« Si même il y a des hommes qui abandonnent le pouvoir, la réserve de ceux qui préfèrent la domination à la soumission est si grande qu’il est difficile de s’imaginer un temps où elle sera épuisée.

« Pour que se produise la christianisation de tous les