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qui peut se formuler ainsi : « Pire cela est, mieux cela vaut. » On dit que plus il y aura concentration des capitaux et, par suite, plus grande sera l’oppression des travailleurs, et plus proche sera l’affranchissement. Tout effort personnel pour s’affranchir de l’oppression du capital est donc inutile. Au point de vue politique, on prêche que plus grand sera le pouvoir de l’état, qui doit s’emparer du domaine encore libre de la vie familiale, mieux cela vaudra ; c’est pourquoi il faut appeler l’intervention du gouvernement dans la vie familiale. Au point de vue de la politique internationale, on affirme que l’augmentation des moyens de destruction conduira à la nécessité du désarmement au moyen de congrès, de tribunaux d’arbitrage, etc. Et, chose étrange, l’inertie des hommes est telle qu’ils adoptent ces théories, quoique toute la marche de la vie, tout pas en avant prouve leur fausseté.

Les hommes souffrent de l’oppression et on leur conseille de rechercher, pour améliorer leur situation, des moyens généraux qui seront appliqués par le pouvoir, auquel ils doivent continuer à se soumettre. Il est bien évident cependant qu’on ne ferait ainsi qu’augmenter la force du pouvoir et l’intensité de l’oppression. Aucune des erreurs des hommes ne les éloigne autant du but qu’ils poursuivent. Ils font toutes sortes de tentatives et inventent toutes sortes de moyens compliqués pour changer la situation, mais ne font pas ce qui serait le plus nécessaire, n’emploient pas le moyen le plus simple qui consiste à ne pas faire ce qui crée cette situation.

On m’a conté l’histoire d’un commissaire de police audacieux qui, arrivant dans un village où les paysans s’étaient révoltés et où des troupes étaient appelées, eut l’idée de réprimer la rébellion à la Nicolas Ier, seul,