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puissante, aurait dû, semble-t-il, impressionner fortement le public, être connue du monde entier et devenir l’objet d’un examen approfondi. Rien de semblable ne s’est produit. Non seulement elle est inconnue en Europe, mais elle est même à peu près ignorée des Américains, qui professent cependant un culte si profond pour la mémoire de Harrison.

La même indifférence attendait un autre défenseur du principe de la non-résistance au mal par le mal, l’Américain Adin Ballou, mort récemment et qui, pendant cinquante ans, a combattu pour cette doctrine.

Pour montrer à quel point tout ce qui se rapporte à cette question est ignoré, je citerai le cas de M. Harrison fils, auteur d’une excellente biographie de son père en quatre volumes. À ma question relative aux adeptes survivants de la société Non-Résistant, il m’a répondu que cette société s’est dissoute, et que, autant qu’il le sait, il n’existe plus de partisans de cette doctrine. Or, au moment où il m’écrivait, vivait encore à Hopedale, dans le Massachusetts, Adin Ballou, qui a collaboré aux œuvres de Harrison, et qui a consacré cinquante ans de sa vie à la propagation, par la parole et par les écrits, de la doctrine de la non-résistance.

Plus tard, j’ai reçu une lettre de Wilson, le disciple et le collaborateur de Ballou, et je suis entré en relations avec Ballou lui-même. Je lui ai écrit ; il m’a répondu et m’a envoyé ses ouvrages. En voici quelques extraits :

« Jésus-Christ est mon seigneur et mon maître, » dit Ballou dans une de ses études qui montre l’inconséquence des chrétiens admettant le droit de la défense et de la guerre. « J’ai promis d’abandonner tout et de le suivre jusqu’à la mort, dans la joie ou la douleur. Mais je suis citoyen de la République démocratique des États-Unis, à laquelle j’ai promis d’être fidèle et de sacri-