Page:Tolstoï - Le Prince Nekhlioudov.djvu/159

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Enfin, il s’enveloppait la tête de son caftan et s’endormait d’un sommeil profond et sain, comme s’endorment les hommes jeunes et robustes. Dans son rêve, il apercevait encore la ville de Kiev, ses saints et sa foule de pèlerins. Il voyait Romen et ses marchandises, Odessa et la lointaine mer bleue couverte de voiles blanches, Constantinople avec ses maisons dorées et ses turques aux poitrines blanches et aux sourcils noirs. Porté par des ailes invisibles, il volait, léger et libre, plus haut, toujours plus haut, voyant au-dessous de lui des villes en or inondées d’une lumière transparente, le ciel infini et ses myriades d’étoiles, la mer bleue et ses voiles blanches, et il savourait la joie de voler plus haut, toujours plus haut.

« Que c’est beau ! » murmura Nekhlioudov. Et cette pensée lui vint : « Pourquoi ne suis-je pas Iliouchka ! »