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déposer les armes, comme le font les parlementaires quand ils se réunissent pour les délibérations.

Mais aussi longtemps que les gouvernements, se méfiant l’un de l’autre, non seulement ne réduisent et ne suppriment pas leurs armées, mais qu’ils les augmentent, conformément à l’augmentation réalisée chez les voisins, et suivent sans cesse, grâce à leurs espions, chaque déplacement de troupes, sachant que chaque puissance se jettera sur sa voisine dès qu’elle en aura la possibilité, aussi longtemps que durera cet état de choses, aucune entente n’est possible, et chaque conférence est, ou une sottise, ou un hochet, ou une duperie, ou une insolence, ou tout cela à la fois.

C’est précisément au gouvernement russe qu’il convenait plus qu’aux autres, d’être l’enfant terrible de cette conférence. Le gouvernement russe est tellement gâté par le fait que chez lui personne ne proteste contre ses manifestes et rescrits évidemment menteurs, qu’après avoir sans aucun scrupule ruiné son peuple par des armements, après avoir étranglé la Pologne, pillé le Turkestan et la Chine, et maintenant opprimant avec une noirceur particulière la Finlande, il a proposé aux gouvernements de désarmer, étant persuadé que tout le monde le croirait.

Mais quelqu’étrange, quelqu’inattendue, quelqu’inconvenante que fût cette proposition, surtout dans le moment même où on prenait des dispositions pour l’augmentation des troupes, les paroles, dites pour être entendues de tout le monde, étaient telles qu’il était