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moyen ou des derniers rangs — tous se trouvent en trois rapports différents, relativement aux trois degrés d’idées dans lesquelles ils se meuvent. Il existe toujours, pour un individu isolé de même que pour des groupes d’hommes, des idées du passé vieillies et qui leur sont devenues étrangères, auxquelles les hommes ne peuvent plus retourner, comme il en est, par exemple, pour notre monde chrétien : l’idée de cannibalisme, de pillage public, d’enlèvement des femmes, etc., dont on n’a plus que le souvenir. Il existe des idées du présent qui sont suggérées aux hommes par l’éducation, par l’exemple, par toute l’activité du milieu ambiant, des idées sous l’influence desquelles les hommes vivent dans un temps donné ; comme, par exemple, de notre temps les idées de propriété, de constitution d’État, de commerce, d’utilisation des animaux domestiques, etc. Et il existe enfin des idées qui seront celles de l’avenir ; les unes sont près de leur réalisation et forcent les hommes à changer leur vie et à lutter contre les formes de vie antérieures ; ainsi, par exemple, chez nous l’idée de l’émancipation des ouvriers, de l’égalité des droits de la femme, de l’abandon de la nourriture animale, — les autres, quoique déjà reconnues par les hommes, ne sont pas encore entrées en lutte avec les conditions antérieures de la vie. Telles sont les idées qualifiées de notre temps d’« idéales » — ainsi l’abolition de la violence, l’institution de la communauté des biens, d’une religion unique, la fraternité universelle entre les hommes. Par conséquent, chaque homme et chaque