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ses dépens. Alors Wedensky avait résolu de surveiller le fils d’une façon toute particulière, et ayant trouvé en lui la même indifférence religieuse qu’en son mécréant de père, il s’était mis à le persécuter et même lui avait donné une mauvaise note à l’examen.

En apprenant par Marie Vassilievna l’acte du jeune Smokovnikoff, Wedensky ne put pas n’en point avoir de plaisir. Il trouva dans ce cas la confirmation de sa conviction de l’immoralité des hommes privés de la direction de l’Église. Il résolut de profiter de cette circonstance pour montrer, comme il voulait s’en convaincre, le danger que courent tous ceux qui s’éloignent de l’Église. Mais au fond de son âme il était content de se venger de l’orgueilleux athée.

— Oui… c’est triste, très triste, disait le père Mikhaïl Wedensky, en caressant de la main la grande croix qui pendait sur sa poitrine. — Je suis très heureux que ce soit à moi que vous ayez confié cela. En ma qualité de serviteur de l’Église je veillerai à ne pas laisser le jeune homme sans remontrances, tout en tâchant d’adoucir le plus possible le châtiment…

« Oui, j’agirai comme il convient à mon ministère », se disait le père Mikhaïl, pensant avoir complètement oublié l’hostilité de Smokovnikoff envers lui, et convaincu de n’avoir pour but que le bien et le salut du jeune homme.

Le lendemain, pendant le cours d’instruction religieuse, le père Mikhaïl raconta aux lycéens toute l’histoire du faux coupon et leur apprit que le coupable était un lycéen.

— C’est un acte mauvais, honteux, leur dit-il. Mais la dissimulation est pire encore. S’il est vrai