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qu’au dépôt. Au fait, il y a longtemps que je voulais te donner de quoi t’acheter un veston, ajouta Eugène Mikhaïlovitch. Et il donna cinq roubles au portier.

Vassili prit l’argent, jeta un regard sur le papier et ensuite sur le visage d’Eugène Mikhaïlovitch, puis secoua sa chevelure et sourit.

— C’est connu… ce sont des gens stupides… l’ignorance… Ne vous inquiétez pas, je sais ce qu’il faut dire.

Ivan Mironoff avait beau prier et supplier Eugène Mikhaïlovitch, les larmes aux yeux, de reconnaître le coupon, Eugène Mikhaïlovitch et le portier soutenaient qu’on n’achetait jamais de bois aux paysans.

L’agent ramena au poste Ivan Mironoff, accusé d’avoir falsifié un coupon. Ce fut seulement après avoir donné cinq roubles au commissaire de police, ce que lui avait conseillé un scribe, un ivrogne détenu avec lui, qu’Ivan Mironoff put quitter le poste, sans le coupon et avec 7 roubles au lieu de 25 qu’il possédait la veille. De ces 7 roubles, Ivan Mironoff en dépensa trois à boire, et le visage défait, ivre mort, il arriva à la maison. Sa femme était dans les derniers jours d’une grossesse et malade. Elle commença à injurier son mari ; celui-ci la bouscula ; elle le battit. Sans répondre aux coups, il se coucha sur la planche et se mit à sangloter.

Le lendemain matin, seulement, la femme comprit de quoi il s’agissait, car elle avait confiance en son mari, et pendant longtemps elle proféra des injures à l’adresse du monsieur qui avait trompé son Ivan.

Une fois dégrisé, Ivan se rappela qu’un ouvrier,