Je me rappelle le moment qui précéda l’acte, cette conscience terrible que j’avais de tuer une femme, ma femme.
L’horreur de cette conscience, je m’en souviens bien, et je sais vaguement qu’ayant enfoncé le poignard je le retirai tout de suite, voulant réparer et arrêter mon action. Elle se mit debout et s’écria :
— « Nourrice, il m’a tuée ! »
La vieille bonne, qui avait entendu le bruit, se tenait à la porte. J’étais toujours debout, attendant, et ne croyant pas moi-même à ce qui était arrivé. Mais à ce moment, sous son corset, un flot de sang jaillit. C’est alors seulement que je compris que toute réparation était impossible, et tout de suite je décidai qu’elle n’était pas même nécessaire, qu’il était arrivé ce que je voulais, et que j’avais dû l’accomplir. J’attendis jusqu’à ce qu’elle tombât et que la bonne s’exclamant : « Ô mon Dieu ! » accourût vers elle ; alors seulement je jetai le poignard et je sortis de la chambre.
« Il ne faut pas s’agiter, il faut avoir