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la futilité de la cause. Ce fut, je crois, une question d’argent ; certes, je n’étais pas avare, encore moins l’aurais-je été pour ma femme. Je me souviens seulement qu’elle prit si mal une de mes observations qu’elle voulut y voir mon intention bien avouée de la dominer par l’argent, le seul côté d’où je pouvais tenir des droits. C’était stupide et ridicule, étant donnés son caractère et le mien. Je me fâchai, l’accusant d’un manque de tact ; elle me fit des reproches… et la dispute recommença. Sur son visage, dans son regard, dans son langage je revis cette même haine qui m’avait tant surpris. Je m’étais autrefois disputé avec mon frère, mes amis, mon père même : jamais je n’avais remarqué cette fureur. Bientôt cette haine se dissimula de nouveau dans les caprices de notre volupté, et je me consolai en me disant que ces querelles étaient des malentendus réparables.