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grâce à ces souffrances mêmes, je devinai d’où venait le mal, je compris ma faute, notre faute commune. Écoutez maintenant avec attention ce qui m’a jeté dans le malheur.

Le commencement en remonte à mes seize ans ; j’étais au collège, mon frère étudiait à l’Université. Je ne connaissais pas encore la femme, mais, comme tous mes malheureux camarades, je n’étais plus innocent.

Durant plus d’une année je fus gâté par mes condisciples ; ce n’était pas la pensée d’une femme qui me poursuivait, c’était la femme en général, les femmes, un être doux : l’idée de la femme nue m’obsédait. Je me mettais au supplice, comme vous l’avez fait, comme le font les quatre-vingt-dix-neuf centièmes de nos garçons. Vivant constamment en une sorte d’effroi, je priais, mais je retombais toujours. Bien que perverti en rêve