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vérité éternelle. Et il est aussi impossible qu’il en soit autrement, qu’il est impossible que, dans un wagon plein de pois, deux pois marqués à l’avance viennent se mettre à côté l’un de l’autre. Et ce n’est pas une simple probabilité, c’est une certitude qu’Hélène se serait lassée de Ménélas ou Ménélas d’Hélène. Cette lassitude est plus prompte chez les uns que chez les autres, voilà toute la différence. Ce n’est que dans les mauvais romans que les amours sont sans fin. Les enfants seuls peuvent y croire. Aimer un homme ou une femme toute la vie, c’est vouloir qu’une seule et même bougie brûle éternellement, dit-il en lançant quelques bouffées de fumée.

― Mais c’est de l’amour sensuel que vous parlez. N’admettez-vous pas qu’il est un amour provenant de la conception d’un même idéal, d’un état d’âme identique ?