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je vis en elle une créature humaine, une sœur.

Tout ce qui m’avait offensé, ma jalousie, me parut si peu de chose et, au contraire, mon acte me sembla si terrible, que j’avais envie de tomber à ses pieds, de lui prendre la main et lui dire : Pardonne-moi !

Je n’osai pas.

Elle se taisait, les yeux clos, n’ayant plus la force de parler. Puis son visage défiguré se contracta et elle me repoussa faiblement.

— Pourquoi tout cela est-il arrivé ?

— Pardonne-moi, m’écriai-je.

— Oui, si tu ne m’avais pas tuée ! fit-elle tout à coup, et ses yeux brillèrent fiévreusement.

— Pardonner ! Folie ! s’il ne me fallait pas mourir ! mais tu as atteint ton but et je te hais !

Puis le délire commença et ne cessa plus :

— Tire seulement, je n’ai pas peur. —