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blerait que celui qui dit avec sincérité sa pensée dût rester isolé : mais, le plus souvent, il arrive que tous ou du moins la plupart des hommes ont depuis longtemps la même pensée et le même sentiment, seulement qu’ils ne les expriment pas. Ainsi, ce qui représentait hier l’opinion d’un seul homme deviendra bientôt celle de la majorité. Or, à peine cette opinion publique se sera-t-elle établie, que la conduite des hommes changera.

Sans doute, chacun fût-il libre, se dit en lui-même : « Que puis-je faire, tout seul en face de cet océan de méchanceté et de duperie qui nous envahit ! À quoi bon exprimer sa pensée ? À quoi bon même la démêler ! Mieux vaut ne pas songer à ces questions sombres et embrouillées. Il est