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Cela m’agaçait. Je sentais presque de l’irritation contre le sermonneur. Je regardai la figure du puni. À la voir encore plus pâle, plus souffrante, plus sauvage, je me rappelai, je ne sais pourquoi, les forçats, et la conscience d’une vilenie cria soudain si fort en moi, que j’arrachai l’étiquette en disant au coupable d’aller où il voudrait. Je sentis brusquement, non par l’esprit, mais par tout l’être, que je n’avais pas le droit de torturer cet enfant pauvre, que je ne pouvais faire de lui ce que nous voulions en faire, moi et le fils du dvornik. Je sentis qu’il y a des secrets de l’âme qui nous sont fermés et que la vie peut modifier, non les reproches ni les punitions. Et quelle sottise ! L’enfant a volé un livre ; — par toute une voie longue, complexe, de sentiments, de pensées, de faux syllogismes, il a été amené à dérober un livre : il ne sait pas pourquoi il l’a serré dans son coffre ; — et moi je lui colle un écriteau avec ce mot