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mes joies était d’observer les progrès de Sonia. Apprendre en entier un morceau de musique m’avait toujours paru impossible, et à présent, sachant qu’il l’écouterait et que peut-être il y applaudirait, je n’hésitais plus à jouer quarante fois de suite le même passage, si bien que la pauvre Macha avait fini par se boucher les oreilles avec de la ouate, tandis que, moi, je n’y trouvais aucun ennui. Ces vieilles sonates se phrasaient aujourd’hui sous mes doigts d’une tout autre façon et d’une façon bien supérieure. Même Macha, que je connaissais pourtant et aimais comme moi-même, était à mes yeux toute changée. Je comprenais alors seulement que rien n’avait obligé Macha à être ce qu’elle avait été pour nous, une mère, une amie, comme un esclave de nos fantaisies. Je comprenais toute l’abnégation, tout le dévouement de cette créature