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— Non, ce ne fut pas un simple amour de tête…

Elle se couvrit le visage de ses mains.

— Comment, vous vous êtes donnée à lui ?

Elle ne répondit pas.

— Vous fûtes sa maîtresse ?

Elle se taisait toujours.

Il se dressa et, pâle comme la mort, les joues tremblantes, se tenait devant elle. Il se rappela soudain combien Nicolas Pavlovitch en le rencontrant sur le Newski s’était montré bienveillant et l’avait félicité.

— Mon Dieu, qu’ai-je fait ! Stéphan !

— Ne me touchez pas ! ne me touchez pas ! Que j’ai mal.

Il se retourna et marcha dans la direction de la maison. Il rencontra la mère de sa fiancée.

— Qu’avez-vous, prince ?

— Je… »

Elle se tut en voyant son visage où tout le sang de son corps semblait affluer.

— Vous le saviez et vous vouliez que je leur serve de paravent. Ah ! si vous n’étiez pas des femmes ! s’écria-t-il, en levant son énorme poing au-dessus de la tête de la femme. Puis il se retourna et s’enfuit.

Si cet amoureux de sa fiancée avait été un simple particulier il l’aurait tué. Mais lui, le tsar adoré…

Dès le lendemain, il demanda un congé et offrit sa démission. Et même pour ne voir personne, il s’était dit malade.

Il passa l’été dans son village où il s’occupa d’arranger ses affaires ; et à la fin de la saison, négligeant Pétersbourg, il partit pour un couvent dans le dessein de prendre la robe.