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sitôt que je descendrai la montagne. Bah ! le chapeau est bien recousu, la lettre ne pourra pas tomber ; je ne me découvrirai plus la tête jusqu’à la maison.

Tambour descendit la montagne au galop, Polikei qui avait tout autant de hâte de revenir au logis, ne s’y opposa pas. Tout allait pour le mieux, et notre homme se plongea dans des rêveries agréables, se représentant la reconnaissance de sa maîtresse, la joie de sa famille et espérant une bonne gratification.

Il ôta encore une fois son chapeau, palpa la bienheureuse enveloppe et enfonça davantage son couvre-chef.

L’étoffe du chapeau était usée, et comme Akoulina l’avait recousue avec soin d’un côté, le côté opposé se déchira. L’enveloppe fut mise à découvert.

Le jour commençait à poindre. Polikei, qui n’avait pas dormi toute la nuit, finit par s’assoupir. Sa tête suivait les mouvements de la charrette et l’enveloppe sortait de plus en plus du trou qui s’était fait dans l’étoffe.

Il ne se réveilla que près de la maison.

Son premier mouvement fut de saisir son chapeau, il était bien enfoncé sur la tête ; rassuré complètement, il ne s’inquiéta pas de voir si l’enveloppe s’y trouvait encore. Il s’arrangea et regardant fièrement autour de lui, fouetta Tambour.

Voici la cuisine, le comptoir, voici la femme du charpentier, qui porte de la toile, voici la maison de madame ! Polikei prouvera tout de suite qu’il s’est montré digne de la confiance qu’on avait eue en lui. Déjà, il entendait la voix de la maîtresse qui lui disait :