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— Cesse, Ilia, cesse donc, lui répondit le bailli avec douceur.

Il n’avait pas fini, qu’Ilia se leva précipitamment, s’approcha de la fenêtre, et, la brisant d’un coup de poing, s’écria :

— Ah ! si vous ne voulez pas faire ce que je vous demande, eh bien ! tenez, je vais briser l’autre.

Polikei, en un clin d’œil, se cacha au fond du poêle. Le bailli jeta son morceau de pain et accourut vers la fenêtre. Doutlof mit sa lanterne par terre, ôta sa ceinture et s’approcha d’Ilia qui se débattait entre les bras du bailli et du portier. Ils le tenaient déjà, lorsqu’il aperçut son oncle qui s’approchait, la ceinture en main, et fut pris d’un accès de rage. Il se débarrassa de ses deux adversaires et les yeux injectés de sang s’avança vers Doutlof.

— Je te tuerai, ne t’approche pas, être barbare ! tu m’as perdu. Toi et tes brigands de fils, vous m’avez perdu ! Pourquoi m’avez-vous marié ? N’approche pas, te dis-je, ou je ne réponds pas de moi.

Iliouchka était effrayant à voir, tout son jeune corps tremblant, la figure bleue, les yeux lui sortant de l’orbite. Il semblait capable de tuer les trois paysans qui cherchaient à le terrasser.

— Tu bois le sang de ton frère. Buveur de sang.

Un éclair passa sur la figure du vieux Doutlof. Il fit un pas en avant.

— Tu ne veux pas écouter ? je me vois obligé d’employer la force.

D’un mouvement rapide, il terrassa son neveu, le jeta pas terre, et, à l’aide des deux paysans, lui retourna les mains derrière le dos et les attacha.

— Je t’avais bien prévenu qu’il ne fallait pas faire