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VI


À ce moment, Iégor Ivanovitch descendait les marches de la maison seigneuriale. À mesure qu’il approchait, toutes les têtes se découvraient. Iégor Ivanovitch s’arrêta et fit semblant de vouloir parler.

L’intendant, du haut du perron, dans sa longue redingote, les deux mains dans ses poches, la tête couverte d’une casquette, dominant la foule de ces paysans qui, tête découverte, le regard fixé vers lui, beaux pour la plupart, attendaient le résultat de sa conversation avec Madame, n’était pas le même homme qui avait parlé à Madame d’un air humble et obséquieux.

Ici, il avait l’air imposant.

— Voici, mes enfants, la décision de Madame. Elle ne veut pas désigner de serfs attachés à la maison ; elle vous laisse choisir vous-mêmes vos candidats…

— C’est bien ça ! crièrent quelques voix.

— Selon moi, Dieu lui-même désigne le fils de Kourachkibe et celui de Mitiouchkine.

— C’est juste, lui répondit-on.

— Quant au troisième, il faudra désigner ou bien Doutlof ou bien choisir parmi les familles qui ont deux fils. Qu’en pensez-vous ?

— Il faut désigner Doutlof, il a trois garçons, dirent plusieurs voix à la fois.