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et j’aurais dû le voir. Ce cadenas, c’est le rossignol, la nature… Ce jeune homme avait peut-être raison.

Et il pria longuement jusqu’à ce que ses pensées fussent disparues et qu’il se fût senti rassuré et calme. Il tira alors la sonnette et dit au frère accouru d’amener le marchand et sa fille.

Le couple arriva et aussitôt le père se retira en laissant sa fille dans la cellule.

C’était une blonde, très pâle, très douce, à la figure enfantine et aux formes attrayantes. Il l’avait bénie à son arrivée et demeura terrifié de la façon dont il regardait son corps, au moment où elle avait passé devant lui. Il avait lu sur son visage qu’elle était très sensuelle et faible d’esprit.

Quand le Père Serge rentra dans sa cellule, elle se leva du tabouret sur lequel elle était assise.

— Je veux aller chez papa, dit-elle.

— Ne crains rien, dit-il. Où as-tu mal ?

— J’ai mal partout, répondit-elle, son visage s’éclairant d’un sourire.

— Prie et tu seras guérie.

— Pourquoi prier ? J’ai prié et ça ne sert à rien. C’est à vous de prier et d’imposer vos mains sur moi. Je vous ai vu dans mon rêve.

— Comment m’as-tu vu ?

— Vous m’avez mis votre main sur la poitrine.

Elle prit sa main et la serra contre ses seins.

— Comment t’appelles-tu ?

Il tremblait de tout son corps et, se sachant vaincu, il comprit que le désir dépassait sa volonté.

— Marie. Et alors ?

Elle prit sa main, la baisa et de l’autre elle le prit à la taille, se pressant contre lui.