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il décida qu’il ne pouvait plus rester en ce couvent et il écrivit à son ancien supérieur pour lui demander de retourner auprès de lui. Dans sa lettre, il disait se sentir incapable de lutter seul, sans l’aide de son père spirituel. Il se confessait aussi de son péché d’orgueil. Le courrier suivant lui apporta une réponse qui lui disait que son orgueil était la cause de tout. Son père spirituel lui expliquait que son accès de colère avait pour cause une insuffisante humilité ; il s’était, disait-il, refusé d’accepter les honneurs ecclésiastiques, non par esprit de piété, mais par fierté humaine. Ce qui revenait à dire : regardez-moi, je suis ainsi et n’ai besoin de rien.

C’est à cause de cela, écrivait le vieillard, que tu n’as pas pu supporter le procédé de ton supérieur. Tu te disais : j’ai tout abandonné pour la gloire de Dieu, on me montre comme une bête. Si tu avais vraiment renié la gloire pour Dieu, tu aurais tout supporté. Je vois que l’orgueil profane n’est pas encore mort en ton cœur. J’ai beaucoup songé à toi, mon fils Serge, j’ai prié et voilà ce que Dieu m’a révélé. À l’ermitage de Tambine vient de mourir l’ermite Hilarion. Il y avait vécu dix-huit ans et le supérieur de cet ermitage me demande si je ne connais pas quelqu’un qui voudrait l’habiter. Vas-y et demande au père Païs qu’il te donne la cellule d’Hilarion. Non que tu puisses remplacer celui qui vient de mourir, mais tu as besoin de solitude afin que tu puisses y combattre ton péché. Que Dieu te bénisse !

Serge fit selon les recommandations du vieillard. Ayant montré sa lettre à son supérieur, il lui demanda l’autorisation de partir. Après quoi, il fit don de ce