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IX

Mikhaïl Sémionovitch Vorontzoff, le fils de l’ambassadeur de Russie en Angleterre, élevé dans ce pays, possédait une culture européenne, ce qui était très rare à cette époque parmi les hauts fonctionnaires russes. Il était ambitieux, doux, bienveillant dans ses rapports avec ses inférieurs, et fin courtisan avec ses supérieurs. Il ne comprenait pas la vie sans le pouvoir et l’obéissance. Il avait tous les grades supérieurs et les hautes décorations, et était considéré comme un militaire très habile, même vainqueur de Napoléon sous Krasnoié.

En 1852 il avait soixante-dix ans, mais il était encore très vert, la démarche assurée, et conservait son esprit fin et agréable, employé à soutenir son pouvoir et à consolider et à répandre sa popularité. Il était immensément riche, et par lui-même et par sa femme née comtesse Branitz-kaia, et par les très grands appointements qu’il recevait comme général gouverneur ; mais il dépensait la plus grande partie de ses revenus à construire et entretenir des palais et des jardins sur la côte méridionale de la Crimée.