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VIII

Ce même jour, quand Piotr Avdéieff rendait l’âme à l’hôpital de Vozdvijenskaia, son vieux père, la femme du frère aîné pour lequel il s’était engagé, et la fille de ce frère, une jeune fiancée, battaient l’avoine sur l’aire.

La veille une neige épaisse était tombée, et il y avait eu le matin une forte gelée. Le vieux s’était éveillé au chant du coq, et, voyant à travers la vitre gelée la lumière claire de la lune, il était descendu du poêle, s’était chaussé, avait mis sa pelisse, son bonnet, et s’était rendu à la grange. Après avoir travaillé deux heures, le vieux était retourné à l’izba et avait éveillé ses fils et les femmes. Quand la femme et la jeune fille arrivèrent à la grange, l’aire était bien nettoyée, la pelle de bois était enfoncée dans la neige blanche, fondante, à côté d’un balai, posé la tête en haut, et les meules d’avoine étaient disposées sur deux rangs, entourés de longues cordes. Chacun prit son fléau et se mit à battre en frappant régulièrement chacun trois coups. Le vieux frappait très fort, avec un lourd fléau, en écrasant la paille ; la jeune fille, à coups réguliers, frappait après lui ; la bru ramassait le grain.