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tout d’un coup, je sentis que je n’osais pas, que je ne devais pas discuter avec lui, qu’il a dit ce qui est nécessaire et que moi seul suis coupable. Je me mis à implorer son pardon, et ressentis du dégoût pour moi-même. L’horreur ne dura pas longtemps. J’étais immobile. Je me suis ressaisi ; j’ai tourné d’un côté, et bientôt je me trouvai non loin de la lisière de la forêt.

J’atteignis la lisière et débouchai sur la route. Mes bras et mes jambes tremblaient toujours ; le cœur me battait, mais j’étais joyeux. Je retrouvai les chasseurs et, ensemble, nous retournâmes à la maison. J’étais gai. Je savais qu’il m’était arrivé quelque chose d’heureux que j’analyserais quand je me trouverais seul. Il en fut ainsi. Je restai seul dans mon cabinet et me mis à prier en demandant pardon et me rappelant mes péchés. Il me semblait qu’ils étaient peu nombreux. Mais je me les rappelai et ils me causèrent du dégoût.


Depuis, j’ai commencé à lire les saintes écritures. La Bible m’était incompréhensible, me scandalisait ; mais l’Évangile m’attendrissait. Je lisais surtout la vie des saints et cette lecture me consolait, en m’offrant des exemples qui me paraissaient de plus en plus imitables. À partir de ce moment, les affaires de ma propriété et de ma famille m’intéressèrent de moins en moins ; elles me répugnaient même. Tout me paraissait mal. Comment les choses devaient-elles être, je l’ignorais, mais ce qui était jusqu’alors ma vie cessait de l’être. Je