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en Lui, cependant je priais. Mais Il ne se révéla point à moi. Je Lui adressai des reproches ; tout simplement je ne croyais pas en Lui.

Le lendemain, je fis mon possible pour terminer toutes mes affaires, afin de ne pas être obligé de passer la nuit à l’hôtel. Sans terminer tout, je repartis chez moi, dans la nuit. Je n’eus pas d’angoisse.

Après cette nuit passée à Moscou ma vie, qui commençait à changer depuis Arzamass, se modifia encore davantage. Je m’occupais encore moins des affaires ; je devenais apathique ; ma santé s’altérait. Ma femme exigeait que je me soignasse. Elle disait que mes raisonnements sur la foi et sur Dieu tenaient à ma maladie. Tandis que je savais que ma faiblesse et ma maladie venaient de ce que n’était pas résolue la question sur la foi et sur Dieu. Je m’efforçai de ne pas m’appesantir sur cette question, et je tâchai de vivre dans les conditions habituelles. J’allais à l’église tous les dimanches et jours de fêtes ; je communiais ; même je jeûnais, comme je le faisais depuis mon voyage à Penza, et je priais. Mais tout cela était machinal, je n’attendais rien de cela ; c’était comme si, au lieu de le déchirer, je faisais protester un billet à ordre malgré la certitude qu’il ne serait jamais payé. Je faisais tout cela machinalement. Je remplissais ma vie en m’occupant de mon domaine ; cela, à cause de la nécessité de la lutte, me répugnait, et je n’en avais pas le courage ; mais je lisais des revues, des journaux, des romans, je jouais aux